CROCÉ-SPINELLI. — SIVEL. — Une mission scientifique aérienne avait été confiée à MM. Crocé-Spinelli, Sivel et Gaston Tissandier. Il s'agissait de compléter d'importantes expériences météorologiques commencées dans de précédentes ascensions.
G. Tissandier devait doser le gaz acide carbonique au moyen d'un tube aspirateur et qui se compose d'un tube à potasse dans lequel on fait passer un volume connu d'air pour retenir l'acide carbonique.
Crocé-Spinelli devait rechercher la vapeur d'eau par des observations spectroscopiques. Sivel, aéronaute de profession, dirigeait l'esquif
Cette ascension eut un bien triste résultat. La catastrophe du Zénith fut causée certainement par défaut de précautions.
Une imprudence excessive avait présidé aux préparatifs d'une ascension faite dans le but, bien arrêté d'avance, de s'élever aux plus hauts sommets de l'air.
L'expérience se faisait, non seulement sous l'inspiration de l'Académie des sciences de Paris, représentée par l'un de ses membres, mais encore sous les auspices d'un professeur du Collège de France, Paul Bert.
Le programme des opérations à exécuter avait été tracé avec précision aux explorateurs, et ce programme se rapportait à des déterminations météorologiques à faire dans les plus hautes régions qu'un aérostat pût atteindre.
Et c'est à peine si l'on avait songé à assurer la respiration des navigateurs aériens dans les régions d'une altitude extrême !
Trois petits ballons de caoutchouc, contenant 70 pour 100 d'oxygène et 30 d'air, capables d'entretenir la respiration pendant une heure au plus, voilà ce qu'emportaient les voyageurs. N'aurait-on pas dû songer, non seulement, à les munir d'une forte proportion de gaz respirable, mais encore à rendre, au moyen d'une espèce de masque posé devant la bouche, la respiration de l'oxygène automatique, forcée, pour ainsi dire ? On avait donc oublié combien est dangereux, foudroyant, l'arrêt subit de la respiration !
Dans une lettre écrite après la catastrophe, G. Tissandier s'exprime ainsi:
« Je me sens étourdi, affaissé. Le ballon descend avec une rapidité effrayante. Je tire Sivel et Crocé par le bras. « Sivel ! Crocé ! réveillez-vous ! m'écriai-je. » Sivel et Crocé avaient la figure noircie, yeux ternes, la bouche béante et pleine de sang. Je pus détacher l'ancre au moment voulu. Le choc à terre fut d'une violence extrême.
« en mettant pied à terre, je me suis affaissé; J'ai cru que j'allais rejoindre mes amis dans I'autre monde. »