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Gravure et texte extrait de l'ouvrage 'Abrégé de la vie des plus fameux peintres' d'Antoine Joseph Dezallier d'Argenville, édition de 1762, collection personnelle. Note générale : On appelle vigne en Italie, une maison de plaisance aux environs d’une ville,
Nous avons deux peintres du nom de Caravage, l’un Polidor de Caravage et celui-ci. Ils ont de commun tous deux d’être nés dans le même lieu, et d’avoir porté le mortier de chaux avant que d’être peintres. Le Caravage s’appelait Michel-Angelo Amerigi dà Caravagio, château situé dans le Milanais, dans lequel il est né, en 1569. Son père, maçon de profession, l’employait à faire la colle pour les peintres qui peignaient à fresque dans la ville de Milan : l’habitude d’être toujours avec eux et de les voir travailler, lui inspira le même goût. Sans maître, sans avoir étudié les grands ouvrages, sans consulter les antiques, il devint un grand peintre. Le portrait l’occupa pendant quatre ou cinq ans. Regardant la nature comme la route la plus sûre pour son art, il en était esclave. En effet, il n’a rien peint que d’après elle, saisissant, sans choix, le beau comme le médiocre, copiant même jusqu’à ses défauts. Un jour qu’on lui montrait de belles figures antiques, il dit en se tournant vers plusieurs personnes assemblées près de là : Voyez combien la nature m’a donné de modèles à suivre sans toutes vos statues ; et sur le champ il entra dans un cabaret, et peignit parfaitement une Bohémienne qui passait dans la rue. Michel-Ange, dans sa première manière, suivait le Giorgion ; il était alors suave, agréable, et peignait d’un bon ton de couleur. Il voulut pour se distinguer en prendre une nouvelle, qui, quoique très-dure, lui réussit au point qu’il fut regardé comme un des premiers peintres de son temps. Ses teintes n’étaient plus adoucies, tout était refleuri par des ombres fortes et beaucoup de noir, pour détacher et donner du relief à ses figures ; c’est une opposition subite de clair et d’ombre sans aucun passage de reflets, sans repos, pour frapper davantage le spectateur : ce contraste de lumière et d’ombre est soutenu cependant par une exacte représentation de la nature. Quand on ne peut attribuer la distinction d’un peintre, au vrai mérite accompagné des grandes qualités de l’art : que ce mérite est seulement dû à la nouveauté, cette réputation ne perce pas jusqu’à l'immortalité ; on doit alors regarder un artiste comme un peintre à la mode. Le Caravage fut heureux d’exercer son talent dans un temps où l’on ne peignait que de pratique, son coloris d’après nature n’en parut que plus beau. Cependant sa manière outrée et peu vraisemblable, n'était bonne que pour les portraits, les demi-figures, et ne convenait qu’aux sujets de nuit ; la nature était si parfaitement imitée, ses couleurs locales si bien placées, ses lumières si bien entendues, qu’il ne laissait rien à désirer. Il n’empruntait rien de personne ; sa peinture produisant un si grand effet, frappa Rubens, qui le reconnut, à ce qu’on prétend, pour son maître en clair-obscur. Il ne tourmentait point ses teintes, en les incorporant les unes dans les autres ; il a donné une si prodigieuse vérité aux objets, qu’il les a rendus palpables ; on est même forcé d’avouer que le naturel ne saurait aller plus loin. Toutes ces beautés s’évanouissaient dans les grandes compositions, sa manière de peindre devenait dure et insupportable ; il plaçait ses figures sur le même plan sans dégradation, sans perspective ; et sa lumière était toujours la même dans toutes sortes de sujets. Il peignit le portrait de Paul V, auprès duquel le cardinal Borghèse l’avait introduit ; il fit ensuite celui d’Urbain VIII, et un sacrifice d’Abraham pour ce Pontife. Sans génie, sans dessin, sans lecture, sans étude de son art, le Caravage ne pouvait se passer de modèle ; il disait que chaque coup de pinceau qu’il donnait, n'était point de lui, mais qu’il était dû à la nature. Le nom de naturaliste qui ne convient qu’à un physicien, fut donné de son temps aux peintres qui ne s'attachaient comme lui, qu’à suivre servilement ce que nous montre le naturel. Ce peintre a toujours été malheureux, ne pouvant retourner dans sa patrie, banni de tous côtés, ayant à peine un ami, et étant mort sans secours au milieu d’un grand chemin. Il était ordinairement mal habillé, vivait sans façon à la taverne, où n’ayant pas un jour de quoi payer, il peignit l’enseigne du cabaret, qui dans la suite fut vendue un prix considérable. Michel-Ange a mangé plusieurs années sur la toile d’un portrait, laquelle lui servait de nappe. Sa manière de peindre, quoique noire, est très-vive et moelleuse ; elle fut suivie par le Guerchin, le Valentin, et pendant un certain temps par le Guide : il a donné à ses têtes le vrai caractère de son teint livide, de ses yeux farouches, et de ses cheveux noirs. Son goût est négligé, ses attitudes sans choix, ses draperies mal jetées, nulle noblesse, nulle grâce ; le hasard en faisait rencontrer quelquefois, quand il les devait à la nature : ses portraits sont parfaits. Ses disciples furent Barthelemi Manfredi de Mantoue, Charles Saracino de Venise, Joseph Ribera dit l’Espagnolet, Gérard Honthorft d’Utrech, et Gio Carlo Loth de Munich.
Barthelemi Manfredi de Mantoue, reçut les premières connaissances de la peinture du cavalier Pomeranci, vers l’an 1590. La facilité qu’il avait d’imiter tous les maîtres, le porta à suivre si parfaitement la manière du Caravage, que les peintres même y étaient trompés. Ses sujets ordinaires étaient des joueurs de cartes et des assemblées de soldats ; il a fait aussi beaucoup de sujets d’histoire, d’un ton excellent de couleur. On le reçut dans l’académie de SaInt Luc. Etant devenu infirme par ses débauches, il mourut à Rome dans un âge peu avancé. Le Roi (de France, Louis XV) a deux tableaux de sa main, l'un est Jésus-Christ chassant les vendeurs du temple, l’autre est une assemblée de buveurs. Gio Carlo Loth, né à Munich en 1611 apprit son art de son père Ulderic, peintre de l’Electeur de Bavière : il vint étudier à Rome sous le Caravage, dont le coloris le séduisit ; ensuite à Venise, il se mit sous la conduite du cavalier Liberi, qui ayant étudié longtemps le goût de Raphaël, du Corrège, du Titien, du Parmesan et des autres bons maîtres, en avait su former une manière toute différente de celle du Caravage. Le coloris étonnant de Carlo Loth le fit souhaiter par l’Empereur Léopold, qui le nomma son premier peintre. On voit à Nuremberg un Caton d’Utique s’ouvrant les entrailles ; un Silène nu, qu’on dit être Saint Jérome, demi figure ; un autre Silène ivre dormant sur son broc, se fait admirer à Munich. On voit à Düsseldorf Agrippine mère de Néron sauvée du naufrage ; la mort de Sénèque ; une Madeleine ; à Florence, Caïn et Abel chez le Grand Duc ; à Padoue dans l’église de Sainte Justine, un évêque renversé que l’on perce d’une flèche ; on voit encore à Venise, à l’école de Saint Marc, un Saint Joseph ; à Saint Sylvestre, une adoration des Rois ; au Spirito santo, un autre Saint Joseph, et la mort de ce saint, à Saint Jean Chrysostome. Il mourut à Venise en 1698, âgé de quatre-vingt sept ans. Ses disciples sont Daniel Sayter, Pierre Strudel, etc.
Les dessins du Caravage sont rares, et heurtés d’une grande maniéré qui rend la couleur ; plusieurs sont faits au pinceau, relevés de blanc sur du papier teinté ; d’autres sont arrêtés par un trait de plume lavés au bistre, ou à l’encre de la Chine, rehaussés de blanc au pinceau ; d’autres enfin, sont dessinés à la pierre noire avec des ombres estompées, relevés de blanc de craie, quelquefois mêlés d’un peu de sanguine dans les têtes et autres extrémités. On le reconnaît à son goût bizarre, à ses têtes communes, à ses draperies sèches, ses contours irréguliers, et ses figures trop courtes, prises sans choix, suivant les défauts du naturel.
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