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Gravure et texte extrait de l'ouvrage 'Abrégé de la vie des plus fameux peintres' d'Antoine Joseph Dezallier d'Argenville, édition de 1762, collection personnelle. Note générale : On appelle vigne en Italie, une maison de plaisance aux environs d’une ville, L'ART de la Peinture commença à sortir des ténèbres de l’ignorance en 1240, lorsque Cimabue instruit par les peintres Grecs mandés par le Sénat de Florence, se distingua dans la peinture à fresque et à détrempe. Le Giotto fut son disciple, et en forma d’autres : enfin, Antoine de Messine, en 1430, fut le premier Italien qui peignit à l’huile ; et André Verrocchio, en 1460, se rendit célèbre par un dessin plus correct et par le gracieux de ses têtes. Ce dernier fut Maître de Léonard de Vinci, de Pierre Pérugin, qui le devint à son tour de Raphaël Sanzio. Ce grand maître, cher des peintres Romains, naquit dans la ville d’Urbin en 1482, le jour du Vendredi Saint. Son père, Jean de Santi, reconnaissant heureusement sa médiocrité dans l’art de la peinture, mit son fils dans l’école de Pierre Pérugin, dont la réputation était fort au-dessus de la sienne. Le disciple ne tarda guère à se surpasser. Souvent un élève qui a du génie, piqué du peu d’émulation de son maître, apprend à devenir plus habile. Raphaël le quitta pour aller étudier à Sienne et à Pérouse ; il y peignit plusieurs tableaux, qui passèrent pour être de Pérugin, dont la plus grande gloire a été d’avoir enseigné Raphaël. Sur le bruit que faisaient alors les cartons de Léonard de Vinci et de Michel-Ange, destinés pour le Palais de Florence, Raphaël quitta la bibliothèque de Sienne, où le Pinturicchio l'avait employé, et se rendit à Florence. Les ouvrages de Fra-Barthelemy de Saint Marc, de Léonard de Vinci et de Michel-Ange, furent si puissants, qu’il reforma toute la manière de peindre qu’il tenait du Pérugin. Les termes ordinaires manquent d’énergie, pour faire l’éloge des peintres du mérite de Raphaël ; un auteur doit donc élever son esprit jusqu’au sublime de ces grands hommes, pénétrer leurs pensées, entrer, pour ainsi dire, dans leur enthousiasme. La chapelle que peignait Michel-Ange, et que Bramante, malgré les précautions que prenait ce peintre, trouva moyen de faire voir à Raphaël, fit en lui un grand changement, On prétend qu’il y puisa cette fierté et cette élévation, qui font le principal caractère de Michel-Ange. Ce peintre s'aperçut de ce changement à son retour à Rome, et se douta de l’infidélité de Bramante ; mais ce sentiment est peu sûr ; et Raphaël ne dut un progrès si rapide, quoique le Condivi le rapporte autrement, qu’à l’excellence de son génie : cela est si vrai, que les peintures de la chapelle de Michel-Ange, exposées depuis ce temps-là aux yeux de tous les peintres de l’univers, n’ont jamais pu former un second Raphaël. On exécuta ensuite, sur ses dessins, dans le palais Chigi, l’histoire de Psyché, dont on trouvera le détail à la fin de cet éloge ; une chapelle pour le même Chigi, dans l’église de la Paix, une autre dans l’église de la Madona del Popolo. Jaloux de sa gloire, Raphaël finissait entièrement ses ouvrages, et n’épargnait rien pour leur acquérir l’immortalité. Les figures, les grotesques, les bas-reliefs antiques, tout lui était tributaire. Sa réputation s’étendit par toute l’Europe ; et plusieurs Souverains exercèrent son pinceau : quelques-uns même le recherchèrent avec empressement, principalement Henri VIII, Roi d’Angleterre, fit tout ce qu’il put pour l’attirer dans son pays. Le fameux Albert-Durer, qui lui envoya son portrait et ses estampes, reçut pour réponse de Raphaël, des dessins de sa main. Ces estampes lui donnèrent envie de faire graver, par un de ses élèves (Marc-Antoine Raimondi, le meilleur graveur de Raphaël), quelques-unes de ses productions, dont il faisait lui-même le trait pour les rendre plus correctes. Il commença par la Cène, le massacre des Innocents, le Neptune et la Sainte Cécile (La Sainte Cécile fut envoyée à Bologne à François Francio son ami, qui, surpris de la voir si parfaite, en eut tant de chagrin, dit-on, qu’il en mourut en 1518), qu’il envoya ensuite à Albert-Durer : on disait de ces deux grands maîtres, che Alberto Durero misurava le sue figure col compasso, Rafaello con le grazie. Un génie aussi élevé ne s’était point borné à la seule peinture ; tous les arts étaient de son domaine ; et il savait en agrandir la carrière. Les deux figures d’Elie et de Jonas, modelées de sa main, furent exécutées en marbre par Lorenzetto sculpteur Florentin, ainsi que le bas-relief en bronze, qui sert de table d’autel dans l’église de la Madona del Popolo. L’architecture l’occupa dans la suite ; et il fit bâtir sur ses propres dessins, plusieurs maisons, entr’autres, la vigne du Pape, le palais Pandolfi à Florence, le jardin du Pape, les appartements de la vigne Chigi. Comme il était devenu riche, il se bâtit aussi un palais in Borgo nuovo ; et il eut dans la suite la direction de la nouvelle église de St. Pierre. Les grands peintres savent tout ; Raphaël, Michel-Ange, Jules Romain, Pierre de Cortone ont été des Architectes très distingués. Avec un esprit excellent, Raphaël étudiait sans cesse et travaillait à se perfectionner. S’il peignait une Divinité, il tâchait de transmettre dans sa tête, une partie du feu céleste qui devait ranimer ; une tête de guerrier montrait une ardeur invincible ; les grâces se rassemblaient dans une tête de Vénus ou de Roxane ; au contraire, dans celle d’une Vierge, la beauté simple se joignait au recueillement le plus parfait. Ses têtes de consuls, de tyrans sont terribles ; mais ses martyrs inspirent la sainteté même. Voilà ce qu’on appelle l’élévation du génie de la peinture et la poétique de l’art. Raphaël n’a jamais placé une figure dans ses compositions, qu’elle ne fût fondée sur l’histoire ou sur la fable. Ses pensées, fécondées par l’Arioste et par plusieurs beaux esprits, tels que le Comte Castiglione, qui était son ami particulier, et le Cardinal Bembo, devinrent dans la suite très élevées. Qu’y a-t-il de plus grand, par exemple, que d’exposer aux yeux d’Attila les deux figures de St. Pierre et de St. Paul, l’épée nue et combattant en l’air ; idée aussi sublime que celle d’Homère, qui intéressait les Dieux à l’histoire de ses héros. Pour répondre au grand goût de dessin de Michel-Ange, une manière nouvelle plus gracieuse et qui plaisait davantage, lui fut suggérée, accompagnée de tous les ornements et des convenances de la peinture ; il la forma, cette manière, sur les belles figures Grecques et sur les bas-reliefs antiques, qu’il dessinait avec beaucoup d’application : son esprit y apercevait cette perfection, qui en fait le caractère, et qui devint celui de ses tableaux ; la belle nature était consultée et reformée sur les proportions des anciens statuaires. Ses études d’un crayon bien manié, font connaître évidemment qu’il corrigeait la nature sur l'antique, et qu’il dessinait ses figures nues avant que de les couvrir de draperies, qu’il variait jusqu'à ce qu’elles convinrent à son sujet. Pour peu qu’on veuille réfléchir sur ce grand maître, on verra qu’il traitait également l’histoire sainte et la profane, l’allégorie et la fable. Son grand style se prêtait à tous ces différents objets. Il sut allier la noblesse, l’élégance et la correction de l’antique au vrai de la nature : riche dans ses inventions, dans ses ordonnances, il y joignit la noblesse des attitudes, des expressions fines et piquantes, des draperies admirables, des contours très coulants ; ses airs de tête pleins de grâce et de majesté, rappelaient le sentiment : quelle solidité de jugement dans le choix de ses sujets ! quelle finesse de pensée ! quelle grandeur d’idée dans la manière de les représenter sur la toile ! enfin toutes ces perfections réunies le rendent, sans contredit et sans avoir rien emprunté de Michel-Ange, le plus grand peintre que nous ayons eu jusqu’à présent. Le jugement que porta de Raphaël Annibal Carrache en revenant de Rome, confirme tout ce qu’on vient de dire. Après avoir examiné, dit-il à ses disciples, tous les maîtres d’Italie, Raphaël m'a paru être celui qui a le moins manqué dans ses ouvrages, et qui a les plus petits défauts. Il semble que le temps de Raphaël rappelle les qualités que doit avoir un fameux peintre. Cet art est toujours descendu depuis ce grand maître, qui l’avait porté à son plus haut point, quoique sa vie de peu de durée, ne lui ait pas donné le temps de se perfectionner dans la partie du coloris.
Ses disciples ont été Jules Romain, Jean-François Penni, dit il Fattore, Polidor de Caravage, Maturin, Perin del Vaga, Pélégrin de Modène, Jean dà U dîne, Raphaël dal Colle, Benvenuto di Garofalo, Timothée delle Vitte, Barthelemi Ramenghi da Bagnacavallo, Vincent da san-Giminiano, et autres. Jules Romain et Jean-François Penni furent ses héritiers. Les dessins de Raphaël sont moins rares que ses tableaux : il les donnait libéralement à ses élèves. On sait qu’il dessinait presque toujours pour leur fournir de l’occupation. Quoique plusieurs personnes se soient efforcées de le contrefaire, son maniement de crayon, la hardiesse de sa main, ses grâces, découvriront toujours leur originalité ; il se servait ordinairement de crayon rouge ; il croisait ses hachures très proprement, et les contours coulants et repentis de ses figures, sont seuls capables de les faire connaître. Raphaël a aussi dessiné au bistre, à l'encre de la Chine, rehaussée de blanc ; mais il employait ordinairement la plume avec beaucoup de légèreté, conduisant les hachures de droit à gauche. Comme ce maître n’a point été maniéré, il est plus difficile de connaître ses dessins que ceux d’un autre. On conviendra qu'il faut avoir beaucoup de discernement, pour ne s’y point méprendre. La belle pensée qui règne même dans les copies, est seule capable de tromper bien des amateurs. Les principaux ouvrages de Raphaël à Rome, sont les seize morceaux peints à fresque, dans les grandes chambres du Vatican (ces quatre chambres se suivent, la première s’appelle la salle de Constantin, les suivantes sont les deux chambres de la Signature, et la quatrième se nomme di Torre Borgia.), dont il y en a sept de sa propre main ; - St. Léon qui parle à Attila, - la prison de St. Pierre, - le miracle arrivé pendant la messe à Bolsène, - la fameuse dispute du Saint Sacrement, - l’école d’Athènes, - le mont Parnasse, et - Grégoire IX qui donne les décrétales. Les cinq autres ont été peints sous sa conduite par différents disciples, retouchés de lui. En voici les sujets : - l’histoire d’Héliodore, - l'incendie du bourg Saint-Pierre sous Léon IV, - les Sarrasins chassés du port d’Ostie, - la justification de Léon III devant Charlemagne, et - le couronnement de ce même Empereur. En Espagne, dans le palais de Madrid, - la Vierge au poisson, petit tableau précieux ; dans celui de Buen retiro, un - Portement de croix, avec la Vierge et plusieurs figures, et - une Sainte Famille ; dans la sacristie de l’Escurial, une belle - Vierge avec son fils et Saint Jean ; - la visitation, une - Vierge tenant l’enfant Jésus, avec Saint Jérôme, - un ange et Tobie ; dans le Chapitre, une - Vierge avec l’enfant Jésus et Saint Jean. Le cabinet du Roi possède vingt tableaux de Raphaël, la Sainte Famille, le Saint Michel, la Vierge, appelée la belle jardinière, Sainte Marguerite, le portrait de Jeanne d’Arragon, Saint Jean-Baptiste dans le désert ; le portrait du Comte Castiglione, celui du cardinal Jules de Médicis, une Sainte Famille en petit ; une où Saint Jean présente une croix, une autre où l’enfant Jésus caresse saint Jean ; le portrait de Raphaël et celui de Pontorme ; un Saint Jean l’Évangéliste et Saint Michel terrassant le démon, le même combattant contre les monstres ; Saint Georges sur un cheval blanc combattant un dragon, une Vierge tenant l'enfant Jésus, tableau cintré ; un portrait d’homme ayant le bras appuyé sur une table, celui d’un jeune homme avec un bonnet noir, une Sainte Famille, appelée le silence, qui avait appartenu au prince de Carignan. Le Cabinet de M. le duc d’Orléans offre le portrait de Jules II assis dans un fauteuil, celui d’une vieille ; une Vierge vêtue de rouge avec Sainte Famille en rond, deux Vierges avec l’enfant Jésus, une Sainte Famille, venant de la Reine de Suède, tableaux précieux ; un jeune homme, figure à mi-corps ; la vision d’Ézéchiel, Saint Antoine tenant un livre, Saint François en pied, un Christ qu’on va mettre au tombeau, la prière au jardin des Oliviers, un Portement de croix, une Vierge tenant l’enfant Jésus sur ses genoux, et assise dans une chambre. Ses tableaux de chevalet quoique rares sont répandus de tous côtés ; leur fréquent changement ne permet pas de les indiquer. Marc Antoine Raimondi, Augustin Vénitien, Sylvestre de Ravenne, Caraglius, Beatricius, Bonasone, Æneas Ficus, Georges Mantuan, Corneille Cort, Pietro santi Bartoli, C. Bloëmart, Nicolas Dorigni, Aquila, et quantité d’autres ont gravé d’après Raphaël. L’abbé de Marolles compte 740 pièces, et il y en a davantage, si l’on comprend les planches en bois, gravées par Andréa Andreassi de Mantoue et Ugo da Carpi. On trouve onze morceaux d'après Raphaël, dans le recueil de Crozat.
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