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Henri III, soixante deuxième roi de France
1551 - 1589

Henri III, 62ème roi de France - gravure de Daret - Gravure  reproduite puis restaurée par © Norbert Pousseur

J'ai préféré mon pays à une couronne étrangère.

 

HENRY III ROY DE FRANCE ET DE POLOGNE succéda à son frère Charles 9 fils de Henry second. Il naquit le 19 septembre de l'année 1551 étant Duc d’Anjou. Il fut élu Roy de Pologne et fut obligé de revenir en France prendre possession du sceptre et de la Couronne. Il fut sacré à Reims par le Cardinal de Guise le 15 février 1575. Il épousa incontinent après son sacre Louise de Lorraine fille du Comte de Vaudémont. Il institua l'ordre du St Esprit 1579. Son règne fut fort malheureux. Les guerres civiles reprirent la chaleur qu'ils avaient eue sous Charles 9. Les prétendus faisaient partout un ravage étrange et emportaient la plus part des villes de France. Le Prince de Condé fit entrer une armée d'Allemands en France, donna la conduite au Duc d'Alençon frère du Roy et mécontent. Le Duc de Guise et tous ceux de la maison formèrent un 3ème parti qu'ils appelèrent St Union. Par crainte d’accident l'on fit la paix avec des conditions tout à fait désavantageuses pour la France 1576. Un édit du mois de Juillet la révoqua 1585, autorisa la levée des gens de guerre par les Chefs de la ligue. À la bataille de Coutras 1587 le Duc de Joyeuse eut son armée taillée en pièces. La défaite des Allemands devant Auneau est dédiée au courage du Duc de Guise. Celui-ci enflé de gloire eut envie de porter le Sceptre. Il vint à Paris pour ce sujet ce qui causa les barricades 1588, mais il en perdit l'espérance. le Roy lui pardonna, mais étant peu après encore mécontent de Lui, il le fit tuer par ses affidés 1588. Ensuite le Roy fut assiégé dans Tours par le Duc de Mayenne et dégagé par le Roy de Navarre. De là il vint assiéger Paris. Mais il ne vit pas la fin de cette entreprise à raison qu'il fut tué à St Cloud d’un coup de couteau par un jacobin nommé Jacques Clément sur la fin de la 16e année de son règne. La race des Valois fut éteinte par cette mort. Le Roy n'avait point d'enfants de sa femme. Celle de Bourbon commença de régner en la personne de Henry 4 Roy de Navarre. Cette désastreuse mort arriva le dernier juillet 1589. Sixte V séant à Rome et Rodolphe l’Empire. Son corps fut porté à Compiègne A Paris chez L. Boissevin

 

Retranscription du texte de la gravure (Gravure de Pierre Daret ?)

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Article de Wikipedia

Ci-dessous, Gravures de Dunand et texte extrait de l'ouvrage
Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours, publié par A. Mifliez en 1835

Henri III, roi de France, en costume - gravure reproduite et restaurée par © Norbert Pousseur

Ce costume est a peu de chose près celui que portaient les seigneurs de cette époque. Il se compose d’un petit manteau noir bande or et blanc, et doublé de damas blanc, relevé de dessins or, d’un pourpoint blanc boutonné par devant, de trousses vertes et d’une culotte à longue attache blanche. Les boutons qui se voient au pourpoint sont alternativement or et argent. Les chaînes qu’on remarque sur cette figure sont or. La toque, ornée de dessins or et de deux plumes blanches, est noire. Le cordon auquel pend l’ordre du Saint-Esprit est bleu.

 

Henri III, roi de France, troisième fils de Henri II et de Catherine de Médicis, né à Fontainebleau le 19 septembre 1551, porta d’abord le titre de duc d’Anjou. Il se distingua éminemment aux journées de Jarnac et de Montcontour, où il commandait l’armée royale, fut élu roi de Pologne en 1575, succéda ensuite à son frère Charles IX, mort en 1574 et fut sacré à Reims le 2 février 1575. Il gagna la même année la bataille de Dormans, et tint en 1577 l’assemblée des États-Généraux à Blois, où fut arrêtée la paix avec les Calvinistes, conclue plus tard en 1580. Ce prince annonçait de bonnes ntentions, mais n’avait point la persévérance pour en assurer l’exécution. Entouré d'hommes débauchés dont il avait fait ses favoris, il ne tarda pas à laisser les rênes de l’État dans les mains de sa mère. Le feu de la guerre civile se ralluma, il se forma trois partis : celui des Ligueurs, ayant pour chef Henri, duc de Guise ; celui des Calvinistes, ou Huguenots, conduit par Henri, roi de Navarre, depuis Henri IV, et celui de Henri III, appelé le parti des Politiques, ou des Royalistes. Cette lutte prit la dénomination de Guerre des trois Henri. Les ligueurs étaient soutenus par le pape et le roi d’Espagne. Bientôt les succès rapides du duc de Guise éliraient le roi ; il s’unit avec ce chef des ligueurs contre le roi de Navarre. Celui-ci gagne la bataille de Coutras (1587). Le duc de Guise se rend à Paris, où déjà s’est formée une faction, dite des Seize, contre l'autorité royale. En vain le peuple se barricade et cache les soldats royaux (c’est ce qu’on appelle la journée des barricades 12 mai 1588) : le duc de Guise reste maître de la capitale du royaume. Le roi se rend à Blois, où il convoque les États-Généraux. Il se réconcilie avec le duc de Guise, et le fait assassiner à la fin de la même année, ainsi que le cardinal de Lorraine, son frère. Les principales villes se soulèvent contre le roi, et ouvrent leurs portes au duc de Mayenne, frère de ces deux victimes. C’est alors que Henri III a recours à Henri de Navarre, qui débloque Tours, où le roi était assiégé par les ligueurs ; les deux rois viennent mettre le siège devant Paris. La Ligue touchait à sa ruine, lorsqu’un dominicain, nommé Jacques Clément, alla trouver Henri III, dont le camp était à Saint-Cloud, sous prétexte d’avoir un secret important à lui communiquer.il fut admis en sa présence, et profita du moment où ce prince lisait avec attention une lettre qu’il lui avait apportée, pour lui plonger un couteau dans le ventre. Henri retira lui-même le couteau de sa blessure, et en frappa au front le meurtrier, que les courtisans massacrèrent avec une promptitude qui ne permit pas de connaître par quels ordres il avait agi.
Henri III mourut le lendemain, 2 août 1589, dans la trente-neuvième année de son âge, et la seizième de son règne. Comme il n’avait pas d’enfants, l’ordre de succession appelait au trône les Bourbons dans la personne de Henri IV ; mais ce prince ayant toujours repoussé les sollicitations qui lui avaient été faites d’embrasser la religion catholique, ses droits lui furent contestés. La crainte présente d’un roi calviniste ranima la fureur de la Ligue : l’espoir de se faire acheter, et le plaisir de se faire craindre rendirent à l’ambition toute son activité, et la mort de Henri III fut le signal de nouvelles divisions. En lui finit la branche des Valois qui avait régné deux cent soixante et un ans, et donné treize rois à la France ; il ne resta de cette maison que Charles, bâtard de Charles IX.

Henri III, roi de France, en costume noir - gravure reproduite et restaurée par © Norbert Pousseur

Cet autre costume diffère peu, quant à l’agencement, de celui de la figure précédente. Il est totalement noir, excepté les bas qui sont blancs. Sur le manteau, qui est bandé or, on remarque l’ordre du Saint-Esprit.

 

Quoique neuf mois après que Henri III se fut évadé de la Pologne, cette république eût déclaré le trône vacant, et procède en conséquence à l’élection d’un nouveau roi, ce prince ne laissa pas de conserver toute sa vie le litre de roi de Pologne. Le luxe et la passion du jeu furent portés à son comble sous son règne. On employa pour la fabrication des étoffes tant de matière d’or et d’argent, que les hôtels des monnaies en manquèrent. Le marc d’or était alors de 222 livres, et le marc d’argent à 19.

C’est sous le règne de Henri III que l'on introduisit à la cour les fauteuils pour la personne du roi et les pliants pour sa suite. Dans un ouvrage de ce temps-là on représente Henri « assis, ainsi que deux de ses mignons, dans des chaises (fauteuils) de velours, faictes d’une façon qu’ils appeloient brisée ; le reste de la compagnie avoit des sièges qui s’ouvroient et se fermoient comme un gaufrier pris à rebours. »

En 1578, le roi posa à Paris, le 31 mai, la première pierre du Pont-Neuf, qui fut entrepris sur les dessins de Jacques Androuet du Cerceau.

Ce n’est qu’en 1583 que Henri imagina d’établir des congrégations à Paris ; la première fut celle des Pénitents de l’Annonciation-Notre-Dame, et ce fut un spectacle vraiment curieux pour les Parisiens, que les processions où ces hommes marchaient deux à deux, divisés en trois bandes ; il y en avait de blancs, de noirs et de bleus ; tous étaient couverts d’un sac, portant le masque sur le visage, et une discipline à la ceinture.
Un jour de jeudi-saint, elles se firent aux flambeaux, et quelques mignons s’y fouettèrent ; aussi disait-on tout haut que c’était se moquer de Dieu et des hommes.

Henri III avait pris le goût de ces processions lors de son séjour a Avignon ; mais ce qui paraît étrange, c’est que le roi de Navarre se mit à cette époque avec le roi de France parmi les Pénitents blancs, la reine Catherine avec les noirs, et le cardinal d’Armagnac conduisait les bleus ; le roi portait à sa ceinture un grand chapelet dont les grains étaient taillés en figure de tête de mort.

Henri III créa, en 1586, la charge de grand-maître des cérémonies, annexée jusqu’alors à celle de grand maître de I'hôtel. Ce fut Guillaume Pot-de-Rhodes qui en fut le premier revêtu.

Eu 1588 Henri III, craignant pour sa propre sûreté et la tranquillité de Paris, fit entrer dans cette ville un corps de six mille Suisses, et se relira à Lyon, où, loin de s’occuper des affaires du royaume, il se livra à des dépenses inouïes pour de petits chiens d’une espèce très rare alors ; il tenait à sa cour, avec de gros appointements, un grand nombre d’hommes et de femmes qui n'avaient d’autre emploi que de les nourrir ; son amour pour ces animaux fut poussé si loin, qu’il en portait ordinairement plusieurs dans un panier suspendu à son cou avec une écharpe ; il est représenté ainsi affublé dans quelques peintures de l’époque.

Ce n’est pas seulement dans cette circonstance que Henri III donna publiquement des marques de son goût pour divers objets ou divers personnages ; ainsi, à l’occasion de la mort de la princesse de Condé, qui lui avait inspiré un violent amour, il se vêtit tout de noir, et ne parut plus pendant quelque temps que couvert d’habits de deuil, parsemés de petites têtes de mort ; il en avait jusque sur les aiguillettes et les rubans de ses souliers. A une autre époque, il porta, par amour des saints ; grand nombre de petites médailles appelées chemises de Notre-Dame ; il s’amusait encore à découper des images peintes, car alors la gravure en taille-douce n'était point en usage : il les enchâssait et les collait contre les murailles.

En 1582, Henri III fit un édit pour recevoir la réformation du calendrier grégorien. On retrancha en France les dix jours du 15 au 25 décembre.

C est sous ce règne qu’un ingénieur de Venlo inventa les bombes. On doit à Henri III la conquête du Dauphiné, de la Bourgogne, de la Provence, et l'expulsion des Anglais de tout le royaume.

Aux chapeaux, dont l’usage, inventé par Charles VI, avait été renouvelé sous François 1er, Henri III préféra la toque italienne, qui donnait a sa figure un air plus efféminé. Il la portait de velours, ornée de pierreries, penchée sur une oreille, laissant à découvert l'autre à laquelle pendait un diamant.

La vie molle et efféminée de Henri III fut le sujet d’une ingénieuse satire dont nous allons donner quelques extraits. L’auteur se représente jeté par un naufrage dans une île habitée par un peuple, et gouverné par un roi d’une toute autre espèce que les autres hommes ; étant arrivé dans le palais sans être remarqué, il s’introduisit partout avec les serviteurs, et ce qu’il voit n’est qu’une peinture sans exagération de la cour de Henri III.

« C’estoit environ sur les onze heures du matin, dès que j’eus mis le pied dans la chambre, j’y sentis la plus suave odeur, et aussitost je vy un petit vase faict en forme d’encensoir, duquel sortoit la vapeur qui remplissoit le lieu. Cette chambre estoit fort superbement tapissée, et les meubles y estoient fort riches et précieux : mais d’autant que je voulois voir que deviendroit ma compagnie je ne m’amusay pas à les considérer. Je vy donc qu’ils s’en alloient droict à un lict assez large et spacieux, lequel, avec l’espace qu’il laissoit entre luy et la muraille, tenoit une bonne partie de la chambre ; aussitost ceux-cy, ayant tous la teste nue, s’arrestèrent vers les pieds, en attendant que l’un d’entre eulx eust tiré le rideau : mais celuy qui estoit dans le lict commença à se plaindre qu’on l’avoit resveïlle en sursaut, et qu’il estoit trop matin. Luy donc, encore endormy, se mit en son séant, et aussitost on luy mit sur les espaules un petit manteau de satin blanc chamarré de clinquant, et doublé d’une estoffe ressemblant à la pane de soye ; celuy qui luy avoit mis le manteau leva aussi le linge qui luy pendoit fort bas sur le visage, et lui osta un masque qui n’estoit pas des estoffes, ny de la forme de celuy que posent ordinairement les dames, car il estoit comme d’une toile luisante et fort serrée, où il sembloit qu'on eust mis quelque gresse dessus, et se il ne couvroit pas tout le visage, car il estoit eschancré en ondes vers le bas, de peur que cela n’offensast la barbe : après on luy osta ses gants qu’il avoit aux mains et qu’il y avoit eus toute la nuict. Oyant parler assez près de là, je m’approchay, mais à peine fus-je entré dans l’aultre chambre, que je vy trois hommes qu’on tenoit aux cheveux avec de petites tenailles que l’on tiroit de certaines petites chaufferettes : de sorte que l'on y voyoit leurs cheveux tout fumeux. Cela m’effraya du commen cernent ; mais quand je les eus considérés de plus près, je reconnus qu’on ne leur faisoit point de mal ; et, quand cette cérémonie fut achevée, leur teste ressembloit à un tems pommelé ; quand cela estoit parachevé, venoit un homme ayant en main un petit pinceau de fer duquel il se servoit de tirer l’abondance des poils des sourcils, et n’y laisser qu’un traict fort délié pour faire l’arcade ; quelques-uns se servoient d’une espèce de cire d’Espagne, laquelle ils faisoient fondre et l’appliquoient ensuite sur le sourcil autant qu’on en vouloit osier, puis aussitost on arrachoit cette gomme....

« Cette belle et précieuse teste si bien attifée, je vys un des siens qui luy apportoit des chausses bandées et boursouflées auxquelles tenoit un long bas de soye ; d’abord on luy mist des chausses de toille fort déliée, puis on luy mist celles de soye, un aultre vinct incontinent après apporter une petite paire de souliers fort estroicts et mignonnement découpés : je me mocquois en moy-méme de voir de si petite chaussure, et ne pouvois comprendre à la vérité comme un grand et gros pied pouvoit entrer dans un si petit soulier ; toutefois on frappa de la main, tantost le bout du pied, tantost le talon, puis avec une certaine peau on lit entrer la chaussure jusques au lieu où elle devoit aller ; de certains grands liens servoient après à la faire tenir plus ferme, lesquels on façonnoit en sorte qu’ils sembloient une rose ou quelque aultre fleur semblable. Iceux achevés, je vys venir un aultre valet de chambre tenant en ses mains une chemise où j’y voyois par tout le corps et par les manches, force ouvrage de poincts coupés ; mais de peur qu’elle ne blessast la délicatesse de la chair de celuy qui la devoit mettre, car l’ouvrage estoit empézé, on l'avoit doublée d’une toille fort délice. Alors on osta au maistre une longue robbe de soye qu’il avoit et de certaines brassières de couleur, puis sa chemise, puis on luy bailla celle dont j’ay parlé de laquelle on rehaussa aussitost le collet, de sorte que vous eussiez dict que la teste estoit en embuscade. On lui apporta un pourpoinct dans lequel il y avoît comme une forme de cuirassine pour rendre les espaules esgales, car il en avoit une plus haute que l’aultre, et aussi tost celuy qui luy avoit baillé son pourpoinct luy vint reverser ce grand collet de poinct couppé et que j’eusse presque cru estre de quelque parchemin fort blanc, tant il faisoit de bruit quand on le manioit : il falloit le renverser d’une mesure si certaine, qu’avant qu’il fust à son poinct, on haussoit et baissoit ce pauvre estre que vous eussiez dict qu’on lui donnoit la gesne ; quand cela estoit mis en la forme qu’ils désiroient, cela s’appeloit le don de la rotonde. Ce pourpoinct estoit un peu eschancré par devant et la chemise de mesme, afin de monstrer un peu la blancheur et la polissure de la gorge : mais oultre cette eschancrure on n’y laissoit pas d’y voir quelques dentelles de poinct couppé, au travers desquelles la chair parrpissoit, afin que cette diversité rendist la chose plus désirable. Aussi laissa-t-on quelques bouttons de propos délibéré quand on le commença à le bouttonner, qui ne fust pas sans peine, tant cet accoustrement estoit juste au corps. Lors on commença à l’attacher, mais devant on luy secoua les jambes et les cuisses assez rudement, et semblait qu’on luy vouloit apprendre à faire quelques gestes de pantalon : c’estoit pour estendre le bas sur la jambe et sur la cuisse, afin que la forme en parust plus belle : mais ce n’estoit rien de tout cecy au pris de la peine qu’il y eust à joindre ce bas en hault : car estant tous deux forts courts il falloit que l'esguillette servist icy comme d’un bandage d’arbalestre à jalet. Après qu’il fust attaché, on luy vint renverser de grandes manchettes d’ouvrage qui couvroient environ la quatrième partie du bras, tandis qu’un aultre accommodoit fort curieusement la dentelle du collet ; car il falloit qu’elle fust un peu relevée afin de mieux faire la roue : avois-je oublié à vous dire qu’au collet du pourpoinct il y en avoit un aultre attaché d’une austre couleur que n’estoit le pourpoinct, fort piqué et costonné qui se ployoit et renversoit ; de sorte qu’alors que le collet de la Chemise estoit dessus, il estait fort esloigné du corps du pourpoinct. On apporta à la demy-femme un petit coffret dans lequel il ÿ avàit force anneaux ; il en choisit quelques-uns qu’on lui mist aux doigts ; il se fist aussy apporter un petit èstuit d’où l'on prist deux pendans qu’on luy suspendist aux oreilles et une petite chaisne de perles entremeslées de chiffres qu’on lui mist au bras.Un aultre lui apporta une grande chaisne qu’on luy mist au col ; puis on luy mist un chapeau qui ne luy couvroit que le sommet de la teste, craignant qu’entrant plus avant il n’eust gasté cette belle chevelure, dont le cordon assez large et tout rescamé de perles et entrelacé de pierreries ne se rapportait pas mal au cercle de teste que nos femmes souloient porter, il y a quelque temps. A costé du chapeau il y avoit un panache non de plumes, comme nous les portons ordinairement, mais de force pierreries agencées en forme d’aigrette. On lui apporta une petite paire de gants fort déliez, qu’il fut fort long-temps à estendre sur sa main, de sorte qu’après qu’il eut faict, ils sembloient y avoir esté collez, et puis on lui en bailla d’aultres fort parfumez et découpés à grandes taillades par les bords, lesquels estoient doublées de satin incarnadin et ratachées avec de petits cordons de soye, de même couleur. Je vy qu’on lui mettoit à la main droite un instrument qui s’estendoit et se replyoit en y donnant seulement un coup de doigt, que nous appelions icy un esventail ; il estoit d’un velin aussi deslicatement descoupé qu’il estoit possible, avec de la dentelle à l'entour de pareille estoffe, il esloit assez grand : car cela devoit servir comme d’un parasol pour se préserver du hasle. Lors commença à se remuer de luy-méme, car jusques lors il n’avoit eu mouvement, que par l’ayde d’autruy ; mais il branloit tellement le corps, la teste et les jambes, que je croyois à tous propos qu’il deust tomber de son long. J’ay appris depuis, que c’est à cause qu ils trouvent ceste façon la plus belle que pas une aultre. Celuy que j’avois esté le plus curieux de voir habillé que pas un des aultres, leur proposa d’aller voir celuy en la chambre duquel j’avois entré premièrement ; je me mestai au nombre de leurs suivans : ils s’en allèrent du mesme geste que j’ay dict plus hault à la ruelle du lict. Nous trouvâmes ceste chambre toute jonchée de roses, giroflées, et aultres fleurs ; mais c’estoit beaucoup d’espaisseur, car on disoit que cela soulageoit fort les pieds de celuy qui estoit seigneur du lieu, lesquels aultrement se fussent offensés aux lambris de la chambre : les rideaux du lict estaient tirés de sorte qu’on pouvoit voir une partie de ce qui s’y faisoit. Ce lict estoit bien l’un des plus richement parez, car le ciel estoit faict par carrez dont le fond estoit de toille d’argent rehaussez d’or et de soye : les montans estoient d’or nuez de relief, et le double ciel ; sur le lict estoit une grande house à bastons de velours vert, chamarrée de clinquant, à bastons rompus qui estoit un secret hiéroglifique du pays ; elle estoit traînante à un pied près de terre, et au-dessous se voyoit le soubassement de mesme estoffe ; au milieu du lict on voyoit une statue d’un homme à demy hors du lict, qui avoit un bonnet à peu près faict de la forme de ceulx des petits enfants nouveaux vestus, il y avoit seulement cette différence qu’au lieu des boitillons qu’on a accoutumé de mettre entre les découpures, c’estoient des cheveuz frisez, arrangez et poudrez, il avoit des brassières de satin incarnadin tout de broderies de nuances, où estoient despeintes les amours d'Adrien et d’Antonius. Le visage estoit si blanc, si luysant, et d’un rouge si esclatant, qu’on voyoit bien qu’il y avoit plus d’artifice que de nature ; il avoit une fraise empesée et godronnée à gros godrons, àu bout de laquelle il y avoit de belle et grande dentelle ; les manchettes estoient godronnés de mesme ; pour les brassières, elles estaient fort amples, et s’estendoient fort largement sur le lict ; il avoit les mains nues, et à ses doigts quelques anneaux ; sous ses bras il y avoit deux oreillers de satin cramoisy, en broderie, afin de les luy soutenir sans peine ; sous le lict on voyoit un grand marchepied, et à la ruelle force siège de mesme parure que le lict et houssez pour la mesme considération : en ceste ruelle allèrent les trois personnes que je disois cy-dessus, et commencèrent à invoquer ceste idole par des noms qui ne se peuvent pas bien représenter en notre langage, d’autant que tout le langage et tous les termes de ces hommes sont les mesmes que ceux que les grammairiens appellent du genre commun et tiennent autant du masle que de la femelle : un de leur suite qui entendoit bien l'italien, me dict qu’ils donnoient mille louanges à ses perfections : celuy que j’avois vu habiller de pied en cap luy vint passer la main sur le visage, comme pour le flatter ; mais aussi tost ce que j’avois pour muet et sans vie commença à parler et se prit à dire avec desdain et mépris : Ha que vous estes importun, vous me gastez ma fraise, etc, »

Les autres parties de cette satire n’offrant rien de relatif aux modes ni aux costumes de l’époque, nous n’en parlerons pas.

 

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