Gravure (de Léopold Massard) et texte extrait de l'ouvrage 'Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours', publié par A. Mifliez en 1835 - Coillection personnelle
Ce piéton arbalétrier est tiré d’un ancien monument du XIIe ou du XIIIe siècle. Il paraît revêtu d’un de ces jaques de cuir de cerf, que Louis XII fit prendre aux francs-archers : le chaperon et le gorgerin sont d’une seule pièce : il est couvert d’une robe sans manche, assez semblable à une cotte d’armes : elle va jusqu’au-dessus du genou.
Il tient de la main droite une flèche empennée, et de l’autre une arbalète.
Arbalétrier du 13ème siècle
Le costume de cet Arbalétrier diffère totalement de celui que nous avons précédemment donné. Il est coiffé d’un casque léger nommé salade, et vêtu d’une jaque. Cet habillement de guerre, ainsi que nous l’avons déjà dit, était bourré entre les toiles et l’étoffe dont il était composé. Il était d’un cuir de cerf, doublé de vingt-cinq ou de trente toiles usées, et médiocrement déliées. Il y a des auteurs qui prétendent que ces jaques étaient à l’épreuve, et qu’on avait rarement vu des soldats tués dans cette armure.
L’arbalète fut connue en France avant le règne de Philippe-Auguste ; et en Angleterre, avant celui de Richard-Cœur-de-Lion. Il y en avait dans les armées françaises sous Louis-le-Gros. L’abbé Suger rapporte, dans la vie de ce prince, qu’il attaqua Drogon de Moutiac avec une grande troupe d’archers et d'arbalétriers, et que Raoul de Vermandois eut l’œil crevé par un carreau d’arbalète. Le second concile de Latran, tenu en 1139 sous le règne de Louis-le-Jeune, père de Philippe-Auguste, anathématisa l’usage de cette arme, qu’il appelle meurtrière et odieuse à Dieu.
Cette défense fut observée sous Louis-le-Jeune et au commencement du règne de son fils. Il n’y avait pas sous Philippe-Auguste un seul homme dans les armées qui sût faire usage de l'arbalète,; mais peu à peu Richard-Cœur-de-Lion en rétablit l’usage en Angleterre, et la France l’imita. Le concile défendait seulement d’employer cette arme contre les chrétiens et les catholiques. On crut sans doute ou on feignit de croire qu’en la dirigeant contre les Sarrasins, elle cessait d’être un objet d’horreur aux yeux de l’Éternel ; on s’en servit dans les croisades, et soit qu’on ne la trouvât pas plus meurtrière ni plus odieuse que tout autre, soit qu’on en eût tiré un très grand avantage dans ces guerres lointaines, on l’employa ensuite en Europe contre les catholiques.
Aussitôt nouvelles foudres contre l'arbalète qui prévalut cette fois, et dont on ne cessa de se servir que vers le milieu du règne de François Ier. Ce prince avait encore parmi ses gardes, à la bataille de Marignan, deux cents arbalétriers : ils étaient à cheval, et s’y distinguèrent.
L’usage de l'arbalète fut ensuite aboli presque entièrement, excepté parmi les Gascons. Suivant Montluc, les armées françaises faisaient encore usage d’arbalètes, en 1523 ; Il faut noter, dit-il, que la troupe que j'avais n’était que d'arbalétriers.
Ci-dessous 2 autres arbalétriers du 14ème siècle, sans commentaire particulier, accompagnant ces gravures.
Arbalétrier du 14ème siècle, pointant son arme
Arbalétrier du 14ème siècle, armant son arbalètre
Texte et gravures ci-dessous, extraites de l'ouvrage 'Costume du Moyen âge d'après les manuscrits',
de Jacques Joseph van Beveren et Charles Pressoir - 1847
Collection personnelle
Arbalète
L’arbalète est celle dont les francs-arbalétriers avaient seuls le privilège de se servir. Le cranequin servait à tendre l’arbalète : on le portait à la ceinture.
Les arbalètes étaient en quelque sorte des arcs composés, portant plus loin et plus juste qu’un arc simple. Leurs principales parties étaient un arc en acier, monté sur un affût appelé arbrier, une corde, une noix, et une détente. Il fallait une grande force pour les bander, ce qui se faisait ordinairement à l’aide d’un levier en fer ou d’un tournique.
Il y avait différentes sortes d’arbalètes, par rapport à leur forme, à leur proportion et à la manière de les bander, on en faisait usage à la guerre et à la chasse. Les traits qu’on lançait avec les arbalètes se nommaient viretons, parce qu’ils tournaient en l’air, par le moyen des ailerons ou pennes dont ils étaient garnis ; la plupart de ces traits, tout unis, n’avaient qu’un simple fer pointu ; quelques-uns étaient carrés, d’autres triangulaires, d’autres encore arrondis ; il y en avait, enfin, de forme plate et triangulaire.
On lançait aussi avec les arbalètes qu’on appelait à jalet, des cailloux et des balles de fer ou de plomb.
L’usage des arbalètes se conserva encore longtemps après l’invention des arquebuses, même lorsqu’elles eurent été perfectionnées et rendues plus maniables qu’elles ne l’étaient dans l’origine. Ce fut seulement vers la fin du XVIe siècle que cette arme fut entièrement abandonnée.
Arbalète
Cranequin (ou Tournique) d'arbalète
CRANEQUIN
CRANEQUINIER. substantif masculin. C’est le nom qu’on donnait autrefois à certains Arbalétriers à pied et à cheval, qui portaient des arbalètes légères faites premièrement de bois, puis de corne, et enfin d’acier. Elles se bandaient avec un bandage de fer attaché à la ceinture, qu’on appelait pied de biche, ou cranequin, d’où est venu ce nom, que Philippes de Comines croit être Allemand. Il y avait autrefois un Grand Maitre des Arbalétriers et Cranequiniers, à la charge duquel le Grand Maitre de l’Artillerie a succédé.
Dans les Auteurs Latins on les appelle Crenkinarii.
(Dic. Furetière, 1690)
Arbalète. Terme de Marine, ou Balestrille, ou Bâton de Jacob, est un instrument dont on se sert sur la mer pour prendre les hauteurs. Il est composé de deux bâtons ou règles de bois, ou de cuivre, qui se mettent à angles droits, et qui ont des divisions sur les bords. La croisée s'appelle marteau ou traversier ; et le montant la flèche. Le marteau est mobile sur la flèche, et a des pinnules à ses extrémités. C’était autrefois un quart de cercle gradué, et attaché par le milieu à une règle : ainsi il avait la figure d’une arbalète, dont il a pris son nom. On l’a appelé aussi Croix Géométrique, et Verge d'or. On l’appelle aussi quelquefois, Radiomètre, ou Rayon Astronomique, ou simplement Fleche. Il y a aussi un instrument nommé Demi-arbalète, qui n’a qu’un des bras du marteau, dont ont parlé quelques Routiers Hollandais. Il y en a quelques-uns au contraire qui ont trois marteaux.
(Dic. Furetière, 1690)
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