Gravure de Léopold Massard et texte extrait de l'ouvrage 'Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours', publié par A. Mifliez en 1835
Enguerrand de Monstrelet, chroniqueur ou historien du xve siècle, naquit vers l’an 1390. Aucun détail sur sa vie privée n’est parvenu jusqu’à nous, seulement on sait qu'il fut prévôt de Cambrai et bailli de Walincourt. Un acte capitulaire de la cathédrale de Cambrai, daté de 1437, prouve qu’il était, à cette époque, bailli de ce chapitre; mais il avait perdu celte qualité au moment de sa mort, arrivée en 1753. Les Mémoriaux de Jean-Ie-Robert, abbé de Saint-Auber, relatent, ainsi qu’il suit, les obsèques du prévôt de Cambrai (traduction libre en dessous) :
« Le xx jour de juillet, l'an XIIII C LIII (1453), lui, honorable homs, et noble Engherans de Monstrelet, escuyers, prevost de Cambray, et baillis de Walincourt, trépassa et eslisit sa sepulture aux Cordelois de Cambray, et fu la porté en 1 portatoire enveloppez dune natte vestus en habit de Cordelois, le visage au nud, et y heult VI flambiaux et iiij chirons de iij quarte chacun autour de le biere, ou il y avoit un linceul estendu.... Un habit de Cordelois, et heult loffice de le tresorie, le quart de ledite chire, et li curez de cheens le quart des affrandes, et ny heult nient de drap. Il fut né de bas, et fu uns biens honnestes homs et paisible, et croniqua de son tems les gherres de France, d’Artois, de Picardie, et de Engleterre, et de Fland ; de ceulx de Gand contre Mons. Le ducs Phelippe, et trespassa XV ou XVJ jours avant que la pais fust faicte, qui se fîst en le fin de juillet l'an XIIII C LIII (1453). Loez en soit Dieux et bénis. »
Le xx jour de juillet l'an 1453, lui, honorable homme, et noble Enguerrand de Monstrellet, écuyer, prévôt de Cambrai, et Bailli de Walincourt, trépassa et élut sa sépulture aux Cordeliers de Cambrai, et fut là porté en un brancard enveloppé d'une natte et vêtu en habit des Cordelier, le visage nu, et il y eut quatre flambeaux et quatre chiron (amas de cire ???) de 3/4 chacun autour de la bière, où il y avait un linceul étendu... Un habit de cordelier, et il y eut un office de la trésorerie, le quart de ladite cire, et le curé du lieu le quart des offrandes et il n'y eut pas de drap. Il fut né de bas, et fut un bien honnête homme et paisible, et chroniqua de son temps, les guerres de France, d'Artois, de Picardie, et d'Angleterre, et de Flandre; de ceux de Gand contre Mons. Le duc Philippe, et trépassa 15 ou 16 jours avant que la paix fut faite, que se fit en la fin juillet l'an 1453. Loué en soit Dieu et béni.
Cet article de nécrologie a fait penser que Monstrelet était bâtard, â cause des mots né de bas, qu'il est impossible de concilier avec les titres de noble et d'écuyer, donnés à Monstrelet, qui d'ailleurs commence sa chronique par ces mots : Je suis Enguerrand, issu de noble génération.
Si Monstrelet fût né de basse extraction, suivant la signification qu'on attache aux mots né de bas, il n'eût point été à la tête du corps échevinal d'une ville impériale, alors composé presqu'entièrement de nobles. Les historiographes contemporains s'accordent â le qualifier de nobilis scutiter, armiger. A l'appui de ces preuves, on peut ajouter celle qu'un fils de Monstrelet, reçu chevalier de Malte, prit vêture en cette qualité, le 19 juillet 1444, dans la cathédrale,de Cambrai.
A cette époque, la qualification de bâtard n’avait rien d’injurieux. Ce ne fut que sous le règne de Henri IV que les enfants naturels des nobles d’extraction furent privés de la noblesse. On a insinué, en 1808, qu’au lieu de né de bas lieu, il devait y avoir né de Ponthieu, contrée où se trouve la terre de Monstrelet.
Quoi qu’il en soit de sa qualité, Monstrelet est jugé favorablement comme historien : l’hommage le plus flatteur qu’il ait pu recevoir est d’avoir été consulté et suivi par le président Hénault. Bayle, Moreri, le P. Lelong, Foppens, Duverdier, Duchêne, Sorel, Lenglet-Dufresnoy, s’accordent à louer la fidélité des dates, la naïveté du style, et la clarté des faits de ses chroniques .
Son costume : Enguerrand de Monstrelet est coiffé d’un chapel à rebord, comme les grands seigneurs le portaient â cette époque ; le chaperon ou épitoge est d’hermine; la robe est bleu-outremer; la ceinture réhaussée d'’or et le vêtement qui se voit près du cou sont rouges.
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