Gravures (de Léopold Massard) et textes extraits de l'ouvrage 'Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours', publié par A. Mifliez en 1835
Cette figure de soldat est tirée d’un manuscrit qui est en Angleterre : elle représente un soldat normand ou Saxon, combattant. Strutt le croit du VIIe siècle ; et en effet, si l’on se rappelle quelles étaient les armes des anciens peuples de la Germanie, on pourra juger des changements qu’elles ont pu subir pendant l’espace de deux ou trois cents ans.
Les armes étaient l’épée, la francisque, ou hache à deux tranchants, qu’on lançait quelquefois de près ; l’angon ou javelot à crochets, la massue, nommée Cateie ; enfin, la framée, espèce d’haste, dont le fer était court, étroit, mais assez fort et assez acéré, pour qu’on pût s’en servir de près ou de loin, suivant que l’occasion le demandait.
Les armes défensives consistaient en un bouclier plus long que large, qu’on peignait de différentes couleurs ; quelquefois en une cuirasse faite avec des peaux de bêtes féroces ; et d’autres fois, mais rarement, en un casque de cuir ou de métal. Du reste, les Germains combattaient presque nus.
Un petit manteau carré s’attachait sur l’épaule droite, et ce qui servait à distinguer les plus riches d’entre eux, c’étaient des vêtements courts, serrés, et qui dessinaient les formes du corps.
Francisque, substantif féminin. Arme faite en façon de hache, dont se servaient particulièrement les anciens Français, qu'on appelait autrement Ancon. Son fer avait la figure d’une de nos fleurs de lis : et c’est de la que la pluspart des Auteurs savants en Blason en tirent l’origine. Papias et Joannes de Janua la prennent pour ces enseignes ou marques d’honneur qu’on portait à Rome devant les Consuls et les Magistrats. (Dic. Furetière, 1690)
Hast, substantif féminin. Vieux mot qui signifiait autrefois, toute sorte d’arme offensive qui avait un long bois ou manche. Les piques les hallebardes, pertuisanes, javelines, sont armes d'hast. Ce mot vient du Latin hasta. En quelques Provinces on appelle une broche une haste et on appelle encore contrebasturs, les chenets qui portent les broches. (Dic. Furetière, 1690)
Pique, substantif féminin. Arme d’hast offensive faite d’un long bois de quatorze pieds, ferré par un bout d’un fer plat et pointu, dont on arme le tiers d’une Compagnie d’infanterie pour soutenir l’effort de la Cavalerie. Les piques de Bresil, les piques de Biscaye, sont les plus estimées.
L’arme des Officiers à pied est la pique, ils combattent la pique à la main, ils saluent avec la pique.
Les Maîtres des hautes armes enseignent l’exercice de la pique.
Un tronçon de pique.
Ce Bataillon marcha tout hérissé de piques, les piques baissées.
(Dic. Furetière, 1690)
Hallebarde, substantif féminin. Arme d'hast offensive, composée d'un long fût ou bâton d’environ cinq pieds, qui a un crochet ou un fer plat et échancré aboutissant en pointes, et au bout une grande lame de fer forte et aiguë. La hallebarde est l’arme que portent les Sergents et les Caporaux quand ils vont poser des sentinelles. La hante, ou par corruption, la hampe d’une hallebarde, est le bâton dont elle est emmanchée. Hallebarde vient de l’Allemand, hallebard, qui signifie une hache des Gardes du palais ; car halle signifie le vestibule du Palais, et bard une hache (Ménage de Du Cange). D’autres le dérivent de ala, parce que ceux qui portent les hallebardes se tiennent sur les ailes d’une armée, et qu’elle sert plutôt à la ranger qu'à combattre. On l’appelait autrefois Hache Danoise, parce que les Danois s’en servaient.
On dit aussi quand on fait un soldat sergent, qu'on lui a donné une hallebarde.
On dit proverbialement d’une chose fausse. qu’elle est vraie comme les Suisses portent la hallebarde par dessus l’épaule. Les Poètes disent aussi en blâmant une mauvaise rime, que ces mots riment comme hallebarde et miséricorde.
Hallebardier, substantif masculin. Soldat armé d’une hallebarde. Il y a des compagnies où il y a plusieurs Hallebardiers à la tête, qu’on a nommé autrefois Trabans.
On appelle aussi Hallebardiers, dans les grands ateliers, des manœuvres qui portent sur l'épaule de gros leviers pour aider aux Tailleurs de pierre à lever et à retourner les grosses pierres.
(Dic. Furetière, 1690)
Pertuisane, substantif féminin. Arme d’hast, qui est une espèce de hallebarde qui a un fer plus long, plus large et plus tranchant que les autres. Les Gardes qui sont, proches de la personne du Roy portent des pertuisanes.
Pertuisanier, substantif masculin. Homme de guerre armé d’une pertuisane.
(Dic. Furetière, 1690)
Javeline, substantif féminin. Arme ou demie-pique, dont les Anciens se servaient tant à pied qu’à cheval. Elle avait cinq pieds et demi de long , et son fer avait trois faces aboutissants en pointe. (Dic. Furetière, 1690)
Javelot, substantif masculin. Petite javeline ou flèche qu’on lance sans le secours de l'arc contre l'ennemi. Ce mot vient de capulottus diminutif de capulus, qui est dit comme si le javelot était tout manche, à cause qu'on le darde en le tenant par le milieu (Ménage). (Dic. Furetière, 1690)
Ce soldat du 9ème siècle porte une cotte de mailles très courte sur une tunique qui descend jusqu’aux genoux. Ses souliers sont attachés par des bandelettes comme en portaient beaucoup de Français au temps de Charlemagne. Sa coiffure a la forme du bonnet phrygien. Il a pour arme offensive la lance, et pour arme défensive le bouclier.
Les armes des Français éprouvèrent un changement notable sous la seconde race de nos rois. L’usage des cuirasses, des casques, de l’arc ou des flèches, qui était peu connu dans nos armées sous la première race se trouve non-seulement introduit mais encore ordonné sous la seconde. Il est expressément dit dans les Capitulaires de Charlemagne : « Que le comte ait soin que les armes ne manquent pas aux soldats qu’il doit conduire à l’armée, c’est-à-dire qu’ils aient une lance, un bouclier, un arc, deux cordes et douze flèches.... qu’ils aient des cuirasses ou des casques. » Nous avons, dit le P. Daniel, dans son Histoire de la milice française, la description de l’armure de Charlemagne par le Moine de Saint-Gall : outre le casque et la cuirasse, il lui donne des manches de mailles en forme de brassards, des cuissards composés de lames de fer et des bottes de même métal. Les gens qui l’accompagnaient, ajoute cet auteur, étaient vêtus de même, excepté qu’ils ne portaient point de cuissards pour avoir plus de facilité de monter à cheval. Il est à remarquer que les costumes à cette époque étaient à peu de chose près tels qu’on les portait du temps de Charlemagne ; ils conservaient encore quelque chose des traditions romaines : c’était pour les uns les longues tuniques resserrées par une ceinture et recouvertes d’un ample manteau ou chlamyde, et, pour les autres, le costume militaire romain, où l’on commençait à voir l’invasion du mauvais goût : les boucliers, les épées, les casques avaient pris des formes bizarres qui les éloignaient chaque jour davantage des modèles sur lesquels on avait voulu les façonner, et l’on pourrait dire que le costume avait subi à peu près le même genre d’altération que le langage, corrompu qu’il était par le mélange des mœurs germaines avec les mœurs des anciens sujets romains.
On retrouve le costume romain jusque dans le XIe siècle, sur un sceau apposé à une charte de Robert, duc de Bourgogne.
Voir ci-dessous ce que l'auteur de ce texte donne comme exemple de tenues guerrières mixtes. Cette gravure montre des soldats aux équipements variés, s'activant autour d'un tombeau d'évêque, au 10ème siècle.
Cette représentation de mise au tombeau illustre aussi l'article sur les inhumations
Ce groupe de soldats d’infanterie du Xème siècle, est extrait des manuscrits de Prudentius que possède la Bibliothèque royale. Leurs casques, leurs boucliers, leurs piques et leurs chaussures sont d’une forme rare.
L'infanterie : Tous les historiens se réunissent pour nous apprendre que les Francs, lorsqu’ils sortirent pour la première fois des forêts de la Germanie, combattaient à pied. Cela devait être ainsi ; le peu de pas qu’ils avaient faits vers la civilisation, le climat sous lequel ils vivaient et le pays qu’ils habitaient leur en faisaient également la loi.
Malgré l’exemple des Gaulois, qui combattaient plus à cheval qu’à pied, les Francs durent conserver longtemps leur manière de faire la guerre, et sans doute même l’exemple du peuple qu’ils avaient vaincu fortifia leurs préjugés en faveur de l’infanterie ; aussi cette arme fit-elle la force de leurs armées sous les rois de la première race et sous une partie de ceux de la seconde, c’est-à-dire jusqu’au moment de l’introduction des fiefs. A cette époque, l'infanterie ne fut plus formée que de serfs ou de la lie des hommes libres ; mal composée, elle perdit son ancienne réputation, finit par être infiniment peu nombreuse, et par n’être plus comptée pour rien. Elle resta dans cet état de langueur jusqu’au moment où Louis-le-Gros, en rendant la liberté aux serfs, forma, sous le nom de Communes ou Municipalités, des associations de citoyens dans les villes fermées.
Alors l’infanterie reprit un peu de force, parce que, en reconnaissance de la liberté qu’on leur avait rendue, les communes s’obligèrent à servir à pied toutes les fois que le besoin l’exigerait. Les successeurs de Louis-le-Gros ayant imité la conduite de ce prince, les communes se multiplièrent et l’infanterie devint nombreuse, sans néanmoins devenir bonne. Cet état de choses se maintint jusqu'au moment où Charles VII porta la réforme dans sa cavalerie, et s’occupa réellement de l’infanterie. Les grandes compagnies disparurent, les communes furent oubliées et les francs-archers créés. Ces francs-archers formèrent, pendant tout le règne de Charles et pendant une grande partie de celui de Louis XI, le corps de l’infanterie française. Sous Charles VIII, l’infanterie commença à se perfectionner ; les Suisses nous avaient appris ce que peut une bonne infanterie ; sous elle acquit de la force et de l’éclat, parce qu’elle fut mieux composée et mieux disciplinée : on vit des gentilshommes et même des grands seigneurs servir dans l’infanterie, où ils avaient refusé jusque-là de prendre de l’emploi.
François Ier conserva, pendant les premières années de son règne, l’infanterie française sur le pied où il l’avait trouvée lorsqu’il parvint au trône : en 1534, il crut ne pouvoir mieux faire que de donner à l’infanterie le nom, et en partie la forme et la composition des troupes romaines : en conséquence, il créa des légions ; mais ces légions ne subsistèrent que bien peu de temps.
Henri II remit d’abord l’infanterie en bandes, et bientôt après en régiment. Depuis le moment où l’infanterie française a été divisée en régiments, et surtout depuis le règne de Louis XIV, le nombre des régiments, celui des bataillons dans chaque régiment, la force et la constitution de chaque compagnie ont éprouvé des variations trop fréquentes et presque toujours trop peu importantes pour que nous nous y arrêtions.
Soldat d'infanterie du XIVème siècle : La figure représentée sur cette planche est celle d’un soldat d’infanterie du XIVème siècle que l’on nommait alors archer ou sergent d'armes. Sa veste brune, ornée de broderies d’or, annonce qu’il appartenait à quelque seigneur opulent. La croix blanche qu’on lui voit au milieu du dos se rencontre presque constamment dans le costume bourbon depuis les croisades. Par-dessous ce premier vêtement, il porte une cuirasse de maille dont l’usage depuis Philippe de Valois avait été presque exclusivement abandonné aux fantassins. L’espèce de hallebarde qu’il tient de la main droite est plutôt une arme de parade qu’une arme de guerre.
Cette figure représente un soldat d’infanterie du 14ème siècle, revêtu d’un costume à peu près semblable que celui qui précède, immédiatement ci-dessus. Il faut remarquer l’arme qu’il porte sur l’épaule droite. C’est une faux emmanchée à revers, dentelée et extrêmement pesante : on la nommait fauchard, fauchon, et aussi couteau de brèche. On s’en servait, en effet, spécialement pour défendre les brèches et les portes des villes.
Soldat au 'chapeau blanc' : Quoique l’infanterie ait été longtemps peu estimée en France, et regardée comme la partie la moins importante de l’armée, cependant les soldats qui la composaient n’étaient point exposés sans défense aux Coups de l’ennemi, et ils avaient des armes défensives telles qu’il leur convenait, c’est-à-dire beaucoup moins pesantes et en même temps beaucoup moins fortes que celles de la cavalerie.
Soldat avec bouclier : Les armes défensives qu’on donne ici aux piétons sont la capeline, le jaque et le panier. La capeline était une espèce de casque de fer, auquel on donna toutes sortes de formes.
Le jaque était un justaucorps de peau de buffle ou de cerf. On le couvrait ordinairement de laisches, c’est-à-dire de minces lames ou plaques de fer superposées l’une sur l’autre comme des écailles de poisson.
Ces paniers de tremble, étaient les boucliers des piétons : on les appelle paniers, parce qu’en dedans ils étaient creux et faits d’osier ; l’osier était couvert de tremble ou de peuplier noir et d’un cuir par-dessus. Ces boucliers couvraient presque tout le corps du piéton la figure ci-dessus en offre un exemple.
Bouclier : Le bouclier différa et varia en France, tant pour la forme que pour la grandeur ; il y en avait de ronds ou d’ovales qu’on appelait pour cette raison rondelles. Il y en eut d’autres presque carrés, mais qui vers le bas s’arrondissaient et s’allongeaient en pointe. Ceux de l’infanterie étaient plus longs que ceux de la cavalerie, et quelques-uns couvraient presque le corps. Ces boucliers s’appelaient targes, nom qui se donnait aussi à d’autres boucliers, dont on ne se servait pas pour combattre, mais pour se couvrir. Ceux qui les portaient n’avaient point d’autres fonctions que de les soutenir et de couvrir les archers qui étaient derrière et tiraient leurs flèches contre les ennemis. On appelait aussi ces boucliers tavellas. Les boucliers dont on se servait dans les combats et les tournois étaient de bois, couverts de cuir bouilli, ou d’autres matières dures et capables de résister à la lance. Les chevaliers y mettaient leurs armoiries sur les bords, ou sur le centre, ou à l’extérieur. On ne voit point dans nos histoires que les Français se soient jamais servis de boucliers de cuivre, ni de certains boucliers quadrangulaires et extrêmement concaves.
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